« À ma fille Jordan, la beauté que tu contemples, quelque chose hors de l’image, l’avenir qui n’a pas encore été écrit. Si parfaite, tu es entrée dans la vie, tu es venue au monde, Jordan est ton nom, ta mère et moi l’avons décidé ainsi. Je t’aime, papa, février 2005 »
Cette lettre qu’il a écrite un an après ma naissance est la seule chose qu’il m’ait laissée. J’avais 12 ans lorsque j’ai appris que mon père était mort d’une surdose et qu’il n’avait pas d’assurance vie.
Malgré son combat contre la toxicomanie et la maladie mentale, il était autrefois un jeune artiste en herbe qui voulait concevoir des logos pour des entreprises. Je crois qu’il a vraiment essayé d’être présent dans ma vie lorsqu’il était stable. Ma mère m’a élevée seule, en donnant la priorité à mes besoins avant toute autre chose, y compris elle-même.
J’ai grandi en étant protégée de la toxicomanie de mon père et des difficultés financières de ma mère, et j’ai été pleinement aimée et soutenue dans tous mes projets. Mais lorsque ma mère a perdu son emploi en 2018, elle a connu un épisode psychotique et a été hospitalisée pendant quelques mois. Elle a repris le travail trop tôt et on lui a diagnostiqué par la suite une psychose, qui l’a en outre inhibée alors que ses symptômes de la maladie héréditaire de Huntington s’aggravaient avec le temps.
Maintenant qu’elle a été déclarée invalide par son médecin, ma mère et moi dépendons uniquement des prestations d’invalidité, de mes revenus personnels, d’économies et de l’aide de ma grand-mère pour nous offrir un repas chaud et garder un toit au-dessus de nos têtes. Le bon côté des choses, c’est que je suis heureuse de pouvoir continuer à jouer pour une septième année avec la Calgary Marching Show Band Association, grâce aux subventions et aux diverses possibilités de collecte de fonds offertes par le comité de la fanfare.
De plus, j’ai été acceptée à l’Université de Calgary pour un baccalauréat en communication et médias, qui débutera à l’automne 2024. Avec le recul, j’ai pris conscience de l’importance de l’assurance vie et de la façon dont j’aurais bénéficié de la moindre contribution de mon père.
J’aurais eu la marge de manoeuvre financière nécessaire pour abandonner un cours dont je n’ai pas besoin ou suivre plus de cours que nécessaire simplement parce que j’en ai envie. Toutefois, je ne pense pas à ma situation avec ressentiment ou pitié, parce que personne ne peut changer le passé. J’apprends plutôt à considérer les obstacles comme une leçon de résilience et une occasion de croissance.
À partir de septembre, j’aurai de nouvelles responsabilités et je devrai concilier l’école, le travail, la fanfare et les soins à prodiguer à ma mère. Le programme de bourses Life Lessons de Manuvie m’apporterait une aide financière pour mon premier semestre en entier, ce qui me permettrait de commencer mes études en douceur.
Je pourrais ainsi me concentrer sur l’atteinte de mes objectifs scolaires et parascolaires. Je voudrais m’adresser à tous les autres candidats de ce programme pour leur dire que la situation dans laquelle ils se trouvent n’est pas une situation qu’une personne devrait avoir à subir. Mais vous continuez à persévérer, à poursuivre vos rêves, sans vous soucier des attentes de la société à votre égard.
Il y a de quoi être extrêmement fier.
