D’où viendra la pension alimentaire du conjoint? Réponse : du capital-décès de l’assurance
Avril 2012
En cas d’obligation alimentaire, le produit de l’assurance n’est pas à l’abri. C’est ce que l’on voit dans Matthews v. Matthews, 2012 ONSC 933 (CanLII).
Séparés depuis 2006, les Matthews étaient empêtrés dans des procédures de divorce. Leur litige s’est retrouvé devant les tribunaux en mai 2010, et M. Matthews est décédé le mois suivant, avant la fin du procès. À ce moment, seules restaient pendantes la question de la pension alimentaire et celle de l’égalisation des biens familiaux nets.
Au moment du décès, la succession était pour ainsi dire insolvable. M. Matthews avait une assurance de un million de dollars. Dans une déclaration d’assurance datée du 10 mars 2006, M. Matthews avait prévu que le capital-décès de ce contrat soit versé à un fiduciaire, qui devait remettre 100 000 $ à sa sœur Gwen et partager le reste entre ses deux filles, Nichola et Erika.
Le juge président a rendu une ordonnance provisoire disposant que le capital-décès soit payé à Mme Matthews et qu’elle le garde en fiducie en attendant son attribution définitive par le tribunal. Il a aussi ordonné que Nichola et Erika soient dûment avisées de cette mesure. Quant à Gwen, qui vivait en Australie, elle a perdu ses droits en ne manifestant aucun intérêt pour l’affaire. Le tribunal a estimé qu’en dépit du fait qu’elles étaient bénéficiaires révocables, il convenait que Nichola et Erika soient informées de l’instance et qu’elles aient la possibilité de présenter des observations. Dans le cas contraire, le tribunal risquait de rendre une ordonnance qui les désavantagerait en tant que bénéficiaires désignées de l’assurance. Le juge n’aimait pas l’idée de rendre une telle ordonnance sans avoir considéré leurs arguments.
Le tribunal a signalé que la Loi portant Réforme du droit des successions (Ontario) prévoyait clairement qu’un contrat d’assurance vie peut, même en présence de bénéficiaires irrévocables, être considéré comme compris dans la succession d’un conjoint et servir au paiement d’une pension alimentaire à une personne à charge. Il a cependant précisé que lorsque la succession contenait des biens, le produit du contrat d’assurance ne faisait pas partie de la succession et qu’il fallait veiller à faire porter le fardeau de toute obligation alimentaire par les biens de la succession avant de puiser dans le capital-décès du contrat.
Pour rendre sa décision, le tribunal a examiné l’actif de la succession. Le juge a déclaré que lorsque le reliquat n’est pas suffisant pour satisfaire aux obligations du défunt envers une personne à charge, le tribunal doit se tourner vers d’autres actifs qui peuvent être transmis au titre d’un droit de survie ou autrement que par testament. En l’occurrence, il était manifeste que sans la vente de la résidence familiale et le paiement d’égalisation des biens familiaux par le conjoint survivant, la succession était déficitaire.
Compte tenu de toutes les circonstances et de tous les facteurs à prendre en considération selon la Loi portant Réforme du droit des successions, le tribunal a conclu que 430 000 $ représentait la valeur actualisée d’une pension alimentaire juste et raisonnable dans le cas de Mme Matthews. Comme celle-ci détenait le capital-décès en fiducie, elle avait le droit de se transférer cette somme et devait verser le reste du million de dollars à Nichola et à Erika.
Voilà un autre exemple éloquent de l’impact des demandes de soutien de personnes à charge, même lorsqu’il existe une désignation de bénéficiaires valable.
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