Actualité fiscale

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Comptabilisation des contrats d’assurance vie et d’assurance maladies graves détenus par des sociétés

Dernière mise à jour : décembre 2019 

Introduction

Une société peut être titulaire d’un contrat d’assurance vie pour diverses raisons, notamment pour financer une convention de rachat de parts ou d’actions, garantir un emprunt ou couvrir les coûts engagés pour remplacer un employé clé ou en tant que placement dans l’entreprise. Elle peut par ailleurs souscrire une assurance maladies graves pour couvrir les pertes encourues si un employé clé ou un actionnaire tombait gravement malade. Les états financiers de la société doivent tenir compte des répercussions financières qu’aura le contrat d’assurance pour la société.

Le présent bulletin Actualité fiscale porte sur le traitement comptable approprié qui s’applique aux contrats d’assurance vie et d’assurance maladies graves souscrits par des sociétés. Il aborde aussi les différences entre le traitement d’une assurance vie aux fins de la comptabilité et son traitement aux fins de l’impôt sur le revenu. Pour plus de renseignements sur le traitement fiscal appliqué aux contrats d’assurance maladies graves souscrits par des sociétés, reportez-vous au bulletin Actualité fiscale intitulé « Imposition des contrats d’assurance maladies graves détenus par des sociétés ».

Lignes directrices

Pour les années d'imposition qui débutent le 1er janvier 2011 ou après cette date, toutes les « sociétés ayant une obligation publique de rendre des comptes » au Canada devront adopter les normes internationales d'information financière (« IFRS »). Les sociétés ayant une obligation publique de rendre des comptes sont toutes les sociétés qui rendent des comptes, à l’exception des entreprises à capital fermé, organismes à but non lucratif et entreprises du secteur public. Les entreprises à capital fermé (essentiellement définies comme étant des entreprises à but lucratif dont les parts ne sont pas négociées publiquement et comme n’étant ni des banques, caisses populaires, sociétés de fonds communs, courtiers ou négociants en valeurs ou assureurs) ont le choix d'adopter les IFRS. Ou, encore, elles peuvent appliquer d’autres normes intitulées « Normes comptables pour les entreprises à capital fermé » (« NCECF »).

Les IFRS et les NCECF ne traitent pas spécifiquement de la comptabilisation d’une assurance vie ou d’une assurance maladies graves, mais elles donnent des lignes directrices pour l’inscription de l’actif, du revenu et des frais. Ces lignes directrices sont utilisées pour le traitement comptable lorsque les IFRS ou les NCECF ne contiennent pas de directive précise. De plus, si les IFRS et les NCECF ne traitent pas d’une question en particulier, les normes comptables internationales peuvent servir de lignes directrices.

Lignes directrices émises aux États-Unis pour la comptabilisation de l’assurance vie

Aux États-Unis, le Financial Accounting Standards Board (« FASB ») a défini la façon de comptabiliser une assurance vie (Technical Bulletin 85-4). On indique dans ce bulletin que l’actif inscrit dans les états financiers doit correspondre au montant qui pourrait être réalisé au titre du contrat d’assurance à la date des états financiers. Pour calculer les frais ou le revenu pour la période en question, on rajuste les primes versées pour tenir compte du changement de la valeur de rachat.

En général, lorsque les IFRS et les NCECF ne contiennent pas de directives pour un type d’opération donné, on peut appliquer les normes comptables américaines. Par conséquent, les concepts généraux contenus dans les IFRS ou les NCECF et les directives du FASB peuvent servir à déterminer le traitement comptable approprié pour l’assurance vie.

Souscription d’une assurance vie

L’assurance vie permanente avec valeur de rachat comporte un élément placement et une protection d’assurance. Si le contrat d’assurance vie est racheté, le titulaire du contrat a le droit de recevoir la valeur de rachat du contrat, laquelle correspond à la valeur totale accumulée dans le contrat, diminuée des frais qui s’appliquent si le contrat est résilié au cours des premières années. L’assurance vie temporaire ne comporte qu’une protection d’assurance et aucune valeur de rachat. Lorsqu’un contrat d’assurance vie temporaire tombe en déchéance, le titulaire n’a droit à aucune valeur au titre du contrat.

Selon les IFRS et les NCECF, une société ne sera reconnue comme un élément d’actif dans ses états financiers que si elle contrôle une ressource économique à la suite d’opérations antérieures et que cette ressource a un potentiel d’avantage économique futur. Une société possède le contrôle d’un contrat d’assurance vie lorsqu’elle souscrit le contrat à titre de titulaire et en paie les primes. Le capital-décès peut être considéré comme un avantage économique futur, bien que sa réception soit conditionnelle au maintien en vigueur du contrat et au décès de l’assuré. Quant à la valeur de rachat, elle constitue un avantage économique futur, car il s’agit du montant qui peut être obtenu par la société en cas de rachat du contrat.

C’est donc la valeur de rachat du contrat qui doit être inscrite comme élément d’actif dans le bilan de la société. Chaque année, le changement de la valeur de rachat modifie l’actif figurant au bilan. La différence entre les primes versées pendant l’année et l’augmentation de la valeur de rachat représente les frais d’assurance nets à inscrire dans l’état des résultats. Après un certain nombre d’années, l’augmentation de la valeur de rachat peut dépasser la somme des primes versées pendant l’année. L’excédent figure alors à titre de revenu dans l’état des résultats. Vous trouverez un exemple du traitement comptable à l’Annexe A. Comme l’assurance temporaire ne comporte pas de valeur de rachat, la totalité des primes versées pour l’assurance temporaire est inscrite à titre de dépense dans l’état des résultats.

Lorsqu’une société acquiert un contrat déjà en vigueur, elle peut faire valoir que le contrat devrait être inscrit à sa juste valeur marchande (basée sur une évaluation actuarielle) et non à la valeur de rachat ou une valeur située entre la valeur de rachat et la juste valeur marchande du contrat. Elle peut d’autant plus insister pour que le contrat soit inscrit selon une valeur plus élevée que la valeur de rachat si le contrat est libéré, c’est-à-dire que ses primes ont été payées à l’avance et qu’il est donc peu probable qu’il tombe en déchéance.

La propriété du contrat d’assurance vie influe sur les bénéfices non répartis (ou le déficit) d’une société en raison de la déclaration des revenus et des frais afférents au contrat. Ce facteur peut jouer un rôle dans l’établissement de la capacité d’une société de demander la déduction pour petites entreprises et de la capacité d’un actionnaire de demander l’exonération cumulative des gains en capital. Le bulletin Actualité fiscale intitulé « Assurance vie détenue par une société - Aspects fiscaux » traite de ces deux aspects de l’assurance vie souscrite par une société.

Les notes afférentes aux états financiers doivent indiquer si le contrat d’assurance vie a été donné en garantie d’un emprunt.

Généralement, une prime d’assurance vie n’est pas déductible du revenu imposable. Par conséquent, la partie de la prime qui constitue une dépense est ajoutée au revenu imposable de la société. De même, lorsque l’augmentation de la valeur de rachat est supérieure aux primes versées pendant l’année, ce revenu est soustrait du revenu imposable de la société. 

Décès de l’assuré

Au décès de l’assuré, la société reçoit les sommes dues au titre du contrat. L’actif constitué par l’assurance vie est supprimé dans le bilan. L’excédent du capital-décès sur le montant inscrit comme élément d’actif est déclaré à titre de revenu dans l’état des résultats. Ce revenu peut être inscrit comme un poste distinct.

La société recevra le capital-décès du contrat d’assurance vie en franchise d’impôt. Par conséquent, le capital-décès inscrit à titre de revenu doit être soustrait du revenu imposable de la société.

Vous trouverez un exemple de la comptabilisation d’une assurance vie détenue par une société à l’Annexe A de la présente.

Comptabilisation des contrats d’assurance maladies graves souscrits par des sociétés

En ce qui a trait à la comptabilisation d’un contrat d’assurance, il importe de se demander si le paiement des primes donne lieu à l’acquisition d’un actif qui devrait figurer dans les états financiers de la société. Conformément aux IFRS et aux NCECF, un actif doit comporter un avantage futur, l’entité doit être en mesure de contrôler l’accès à cet avantage, et l’opération ou l’événement qui engendre l’avantage doit déjà avoir eu lieu. De plus, un actif doit être raisonnablement mesurable et il ne peut pas dépendre d’un événement futur. Si le paiement des primes d’assurance donne lieu à l’acquisition d’un actif, les primes devraient être, en tout ou en partie, capitalisées dans le bilan de la société. Si aucun actif n’est acquis, les primes devraient simplement être imputées à l’exercice à titre de dépenses à mesure qu’elles sont payées.

La nature de la garantie de remboursement des primes annexée au contrat est un des facteurs importants qui permettent de déterminer la façon dont sera comptabilisé un contrat d’assurance maladies graves souscrit par une société. Les contrats d’assurance maladies graves peuvent expirer lorsque le particulier atteint un âge déterminé ou demeurer en vigueur la vie durant de l’assuré. Les contrats peuvent comporter une garantie qui prévoit le remboursement de la totalité ou d’un pourcentage des primes au décès de l’assuré si aucune demande de règlement n’a été présentée au titre du contrat (remboursement des primes au décès ou « RPD »). Dans le cas des contrats qui expirent à un âge déterminé, le titulaire peut souscrire une garantie prévoyant le remboursement des primes, en partie ou en totalité, si le contrat expire et qu’aucune prestation d’assurance maladies graves n’a été versée au titre du contrat (remboursement des primes à l’expiration ou « RPE »). Un titulaire peut aussi souscrire une garantie qui prévoit le remboursement des primes (ou d’une partie de celles-ci) en cas de rachat du contrat (remboursement des primes avec option de rachat anticipé ou « RPR »). Cependant, pour avoir droit à ce remboursement, le titulaire doit avoir maintenu son contrat d’assurance maladies graves et sa garantie RPR en vigueur pendant une période prédéterminée (par ex., 15 ans). En ce qui a trait aux caractéristiques de « remboursement des primes », il est important de se demander si le contrat peut être considéré comme un actif (tel qu’il est mentionné ci-dessus).

La prestation au titre d’une assurance maladies graves n’est versée que si l’assuré au titre du contrat est atteint d’une maladie grave couverte. Normalement, les primes ne sont remboursées au décès que si le contrat est toujours en vigueur et si aucune prestation n’a été versée au titre du contrat. Dans le cas d’un contrat d’assurance maladies graves qui expire lorsque l’assuré atteint un certain âge et prévoit le remboursement des primes au décès, il est assez clair que ce contrat ne peut pas être considéré comme un actif puisqu’il est possible qu’aucun versement ne soit effectué au titre de ce dernier.

Si une garantie RPE ou RPR est souscrite ou si le contrat est permanent (c’est-à-dire qu’il demeurera en vigueur la vie durant du particulier), la situation est quelque peu différente. Le titulaire paie un coût bien distinct afin de recevoir une prestation au titre du contrat ou de récupérer les dépenses engagées à une date ultérieure prédéterminée. Par conséquent, il est probable qu’il récupérera une partie ou la totalité des primes. On pourrait alors dire qu’il y a véritablement un actif puisqu’il y a récupération des primes. Toutefois, le versement d’une prestation demeure conditionnel à la survenance d’un ou de plusieurs événements futurs – l’assuré doit être atteint d’une maladie grave ou la société doit continuer à payer les primes afin de maintenir le contrat en vigueur. Comme le paiement des primes dépend encore d’événements futurs, on peut difficilement soutenir que l’opération ou l’événement donnant lieu au paiement de la prestation est déjà survenu. En conséquence, dans la plupart des cas, la société n’inscrira pas comme actif dans ses états financiers un contrat d’assurance maladies graves dont elle est titulaire. Par ailleurs, les primes du contrat devraient être inscrites comme dépenses de la société au fur et à mesure qu’elles sont payées, et toute prestation reçue par la société au titre du contrat devrait être inscrite comme revenu.

Dans certains cas, on pourrait soutenir que le paiement des primes à vie, jusqu’au rachat ou jusqu’à l’expiration du contrat est suffisant pour justifier l’inscription d’un actif pour un contrat assorti d’une garantie RPE ou RPR ou d’un contrat qui ne prévoit aucune date d’expiration. Dès le paiement des primes, une partie ou la totalité de ces primes seraient inscrites à titre d’actif. La valeur comptable de l’actif ne devrait jamais dépasser le montant de la prestation d’assurance maladies graves ou du remboursement des primes, selon le moins élevé de ces montants. Une fois cette valeur atteinte, les primes restantes seraient inscrites comme dépenses pour la société. Dès réception de la prestation d’assurance maladies graves ou du montant du remboursement des primes, l’actif serait radié du bilan et la différence entre la prestation et l’actif serait inscrite à titre de revenu de la société. Ce traitement comptable est justifié uniquement s’il existe des éléments prouvant de façon convaincante que le contrat sera presque certainement maintenu en vigueur et que la société recevra une prestation.

Prenons l’exemple d’un contrat d’assurance maladies graves assorti d’une garantie RPD et d’une garantie RPR au titre desquelles le titulaire peut demander le remboursement des primes après que le contrat a été en vigueur pendant 15 ans. Une fois la période de 15 ans écoulée, trois possibilités se présentent : le titulaire se verra rembourser les primes au rachat du contrat, la prestation d’assurance maladies graves aura été versée (si l’assuré est atteint d’une des maladies couvertes) ou les primes auront été remboursées à la suite du décès de l’assuré. 

Conclusion

Les états financiers d’une société doivent tenir compte de la propriété du contrat d’assurance vie ou d’assurance maladies graves. Les IFRS et les NCECF ne traitent pas spécifiquement de cette question, mais des lignes directrices ont été établies aux États-Unis par le FASB dans le cas d’une assurance vie.

La propriété d’un contrat d’assurance vie avec valeur de rachat influe sur le bilan de la société, sur l’état des résultats, sur les bénéfices non répartis et, parfois, sur les notes afférentes aux états financiers. En général, si une société détient un contrat d’assurance maladies graves, les primes seront inscrites à titre de dépenses dans les états financiers de la société et aucun actif ne sera porté au bilan de la société au titre de ce contrat, mais il peut y avoir des exceptions.  

Service Fiscalité, Retraite et Planification Successorale de la Financière Manuvie rédige régulièrement divers articles. Cette équipe, composée de comptables, de conseillers juridiques et de professionnels de l’assurance, fournit des renseignements spécialisés sur des questions touchant le droit, la comptabilité et l’assurance vie, ainsi que des solutions à des problèmes complexes de planification fiscale et successorale.

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Le présent bulletin est à jour au moment de sa rédaction, mais n’est pas actualisé lorsque des changements sont apportés aux dispositions législatives, à moins d’indication contraire.

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