La perte de mon père, décédé d’un cancer du poumon alors que j’avais neuf ans, a changé le cours de ma vie. En tant que femme autochtone ayant grandi à Martensville, une petite ville à majorité blanche de la Saskatchewan, j’ai souvent senti que je n’étais pas à ma place, isolée et invisible. Ce sentiment n’a fait que s’accentuer après le décès de mon père. Ma mère, qui a grandi avec de graves traumatismes résultant de son passage dans les externats autochtones et de sa mise à l’écart par sa famille à l’âge de 17 ans seulement, a lutté contre la toxicomanie et l’alcoolisme. Sa douleur a créé l’environnement dans lequel j’ai grandi.
L’instabilité à la maison a entraîné l’intervention des services sociaux et, à l’âge de 10 ans, j’ai été retirée de la garde de ma mère pendant près d’un an. Ces mois ont été incroyablement difficiles : j’ai été séparée du seul parent qui me restait et placée dans un système qui, souvent, ne comprend pas ou ne soutient pas les enfants autochtones. Même lorsque j’ai retrouvé ma mère, les choses sont restées instables. Nous avons déménagé quatre fois en raison de difficultés financières et d’insécurité liée au logement. Il n’y avait pas de base, pas de stabilité.
Mon père n’avait pas d’assurance vie et l’absence de soutien financier après son décès a eu un effet d’entraînement qui continue de m’affecter. Sans assurance vie, il n’y avait pas d’argent pour financer mes études, couvrir les besoins de base ou nous donner le temps de faire notre deuil. Au lieu de guérir, ma famille luttait pour survivre. S’il y avait eu une assurance vie, les choses auraient pu être très différentes. Ma mère aurait peut-être reçu le soutien nécessaire pour se rétablir plus rapidement, nous aurions peut-être eu un foyer permanent et j’aurais peut-être pu me concentrer sur l’école plutôt que sur la survie.
À l’âge de 11 ans seulement, j’ai commencé à livrer le journal StarPhoenix. À 14 ans, je travaillais à temps plein chez Tim Hortons. J’y suis devenue superviseure à 18 ans. Ces emplois n’étaient pas facultatifs : ils étaient essentiels pour subvenir à mes besoins et à ceux de ma mère. Après avoir payé le loyer et les factures, il nous restait à peine 100 $ par mois pour l’épicerie. Depuis 2019, je m’occupe également de mes trois nièces, leur apportant stabilité et soutien émotionnel, choses dont j’ai déjà eu besoin moi-même.
Malgré tous ces obstacles, et bien d’autres dont je n’ai pas parlé ici, je n’ai jamais cessé mes études. J’étudie actuellement au baccalauréat en psychologie à l’université, dans le but d’obtenir un doctorat et de me spécialiser dans le travail auprès des jeunes et des toxicomanes. Je suis la première personne de ma famille à faire des études postsecondaires et je n’ai jamais manqué de session malgré les difficultés personnelles que j’ai connues. Mes expériences ont façonné non seulement mes objectifs de carrière, mais aussi mon engagement à changer les choses au sein de ma collectivité.
La perte de mon père, mon expérience en foyer d’accueil et mon enfance en tant que fille autochtone dans une ville majoritairement blanche ont toutes façonné la personne que je suis devenue. L’assurance vie aurait pu alléger de nombreux fardeaux, mais c’est ma résilience, mon identité et l’amour profond que je porte à ma famille qui m’ont permis de continuer. Je continue à lutter pour un avenir meilleur, pour mes nièces, ma future famille et ma collectivité.